Selon moi, une politique en particulier doit être au cœur de la réponse : l’éducation à la sexualité. C’est d’ailleurs un avis partagé par nombre de nos concitoyens qui y voient le premier levier pour améliorer le niveau d’information sur le VIH, d’après le sondage CSA - Crips publié en novembre 2023. Après tout, cet avis est assez logique : avant de parler outils, accessibilité, parcours de santé sexuelle, il faut permettre aux personnes d’avoir des bases et fondations solides.
Concrètement, l’éducation à la sexualité n’est pas une revendication associative mais bel et bien une obligation légale datant d’il y a … 23 ans ! La loi du 4 juillet 2001 prévoit que l’ensemble des élèves doit bénéficier d’une éducation à la sexualité tout au long de la scolarité, à raison d’au moins trois séances par année. Concrètement, ces séances d’échanges abordent des thèmes très larges, comme l’intimité, les violences, le respect de l’autre, la notion de consentement, les droits. Adaptées à l’âge des élèves, elles ont pour objectif d’outiller les jeunes dans une approche positive, de réduire les violences et les discriminations, d’améliorer le respect mutuel et plus largement le vivre-ensemble.
Pourtant, si l’intérêt de cette politique est prouvé et si la loi oblige à sa mise en place, sa mise en œuvre est très « modeste » pour reprendre le terme du rapport de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche, publié en 2021. Selon ce rapport, « moins de 15 % des élèves bénéficient de trois séances d’EAS pendant l’année scolaire en école et au lycée (moins de 20 % en collège) ».
Cette non-application d’une obligation légale pourrait ne rester qu’un problème juridique si les conséquences humaines n’étaient pas aussi importantes notamment quant à une augmentation des idées reçues sur les infections sexuellement transmissibles, une augmentation des violences sexistes et sexuelles et une augmentation des violences LGBTphobes.
Alors, depuis 23 ans, nous attendons une mise en œuvre volontariste de cette politique et à la hauteur des indicateurs de santé des jeunes. Récemment, un signal fort est venue de la publication du programme d’éducation à la sexualité par le Conseil supérieur des programmes. Un travail conséquent avec des propositions très intéressantes. Sur les acteurs concernés et le fait que tous les enseignants, de toute spécialité, seront mis à contribution, ce qui permettra un réel impact. Sur le fond avec une approche basée sur le développement des compétences psychosociales permettant l’augmentation de l’autonomie, la confiance en soi, l’empathie, le développement de l’esprit critique. Sur l’organisation, les séances devant s’inscrire dans le calendrier annuel et dans l’emploi du temps des classes. Sur l’information de l’environnement immédiat des jeunes et la mise en place de temps avec les parents d’élèves, notamment à la rentrée, autour de la présentation du projet pédagogique, incluant l’éducation à la sexualité. Un temps essentiel pour poser les questions et éviter les fake news.
Ceci étant dit, qu’en est-il de l’opérationnalisation du dispositif ? Quid de la garantie de la mise en œuvre effective au sein du monde scolaire ? Quid du suivi annuel de l’obligation de la mise en œuvre de cette politique ? Rien ne le garantit aujourd’hui. A l’Etat de lever les doutes car les enjeux de santé sont de plus en plus importants !
Sylvie Carillon
Président du Crips Île-de-France